dimanche 1 juin 2008

Péril en la demeure


Dans son dernier rapport, déposé en mars 2008, le commissaire à l’environnement et au développement durable se montre particulièrement critique à l’endroit de la gestion fédérale de divers dossiers, dont plusieurs concernent l’avifaune.

Après avoir fait le suivi à l’égard de certaines recommandations et constatations tirées de rapports précédents, le commissaire Ron Thompson juge que les progrès sont insatisfaisants dans 9 secteurs sur 14, notamment la gestion des aires protégées fédérales pour les espèces sauvages et la protection des espèces en péril.

En 2001, l’ex-commissaire Johanne Gélinas tirait déjà la sonnette d’alarme : « Environnement Canada, Pêches et Océans et l’Agence Parcs Canada devraient veiller à ce que les stratégies de rétablissement élaborées pour des espèces en péril soient pleinement mises en oeuvre dans un laps de temps donné. Ils devraient réévaluer la suffisance du financement des mesures de rétablissement et des mesures préventives, et prendre des engagements clairs correspondant au financement offert ». En outre, écrivait-elle, Environnement Canada « devrait élaborer une stratégie pour assurer une gestion efficace des réserves nationales de faune et des refuges d’oiseaux migrateurs ». Sept ans plus tard, ces recommandations semblent être demeurées lettre morte.

Dans son suivi, le nouveau commissaire insiste sur plusieurs lacunes et ses commentaires sont parfois lapidaires : « De toutes les organisations fédérales, Environnement Canada est responsable du plus grand nombre d’espèces en péril au Canada. Le Ministère est clairement en retard pour ce qui est de s’acquitter de ses responsabilités dans ce domaine », souligne-t-il. À cela s’ajoutent plusieurs autres remarques très critiques.

Environnement Canada a fait des progrès insatisfaisants dans la mise en oeuvre de nos recommandations concernant les réserves nationales de faune et les refuges d’oiseaux migrateurs. Ces aires sont en péril.

Environnement Canada a cerné les menaces propres à chacune de ses aires protégées, mais il n’a pas déterminé si les conditions de ces dernières s’améliorent ou se dégradent.

Selon ses propres analyses, Environnement Canada n’a pas affecté suffisamment de ressources humaines et financières pour répondre aux besoins urgents ou pour exécuter les travaux liés à la préservation des sites et à l’application des règlements dans les aires protégées.

Les plans de gestion sont dépassés.
Il n’y a pas d’inventaire complet et à jour des espèces.
La recherche scientifique réalisée par le gouvernement fédéral est limitée.
Les règlements ne font pas l’objet d’une mise en application suffisante.

La situation au Service canadien de la faune n’est pas sans susciter beaucoup d’inquiétude parmi la communauté ornithologique. Les budgets de cet organisme ont été gelés et plusieurs projets de recherche ont été suspendus l’automne dernier. Alors que les chercheurs doivent composer avec un manque criant de ressources financières, Environnement Canada n’a eu aucun scrupule à gaspiller plus de 50 000 $ pour un sondage visant à déterminer si le Service canadien de la faune devait changer de nom pour celui de Service de la conservation et de la protection de la biodiversité! À la lumière des commentaires recueillis, il a finalement été convenu de ne rien changer. Après tout, c’est sous ce bon vieux nom que le service est reconnu internationalement…

Le commissaire à l’environnement et au développement durable a dit espérer que son dernier rapport fournira des renseignements pertinents pour demander aux ministères et aux organismes concernés de rendre compte de la qualité de leur gestion. Cela est tout à fait souhaitable, mais il faut aussi espérer que les élus comprendront que la biodiversité ne peut être assurée sans y consacrer les ressources nécessaires.